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Cancer de l'oesophage

Publié dans Cancérologie digestive et gynécologique

Cette rubrique a pour but de vous informer pour mieux comprendre ce qu'est cette maladie. Comme chaque cas est unique, seul le dialogue avec votre médecin vous permettra de bien comprendre votre situation.


I. Introduction

Environ 5.000 personnes sont touchées chaque année en France par un cancer de l'œsophage. Dans 80 % des cas, ce sont des hommes, âgés de plus de 55 ans. La majorité des cancers de l'œsophage sont des cancers épidermoïdes, développés à partir de l'épithélium. Les adénocarcinomes sont plus fréquents à la partie basse de l'œsophage. 90 % des cancers de l'œsophage sont dus à la consommation de tabac et/ou d'alcool, l'action de deux se renforçant mutuellement. Toute dysphagie (gêne à la déglutition) d'apparition récente et rapidement évolutive doit faire consulter sans tarder. Le diagnostic repose sur l'endoscopie qui permet de faire des biopsies afin de préciser le type histologique du cancer. Le traitement est avant tout chirurgical : oesophagectomie. Lorsque l'intervention est contre-indiquée, d'autres méthodes peuvent être employées (destruction de la tumeur par utilisation du laser ou du plasma argon, mise en place d'une prothèse œsophagienne, dilatations de l'œsophage par endoscopie). La radiothérapie, la chimiothérapie ou leur association ont des indications qui se discutent au cas par cas.

Le pronostic du cancer de l'œsophage est essentiellement lié à l'extension de la tumeur, à l'existence d'un envahissement ganglionnaire et à la présence de métastases.
Mieux connaitre
L'œsophage est un tuyau souple, situé entre le pharynx et l'estomac. L'œsophage est situé entre le pharynx et l'estomac ; il permet d'acheminer les aliments. Il parcourt le thorax de haut en bas, en arrière de la trachée. Puis, il traverse le diaphragme et aboutit dans l'estomac avec lequel il communique par l'intermédiaire du cardia. L'œsophage sert à acheminer les aliments. Il est pourvu de muscles lisses qui se contractent de façon réflexe dès qu'un aliment ou un liquide lui parvient.


II. Types de cancers

Le cancer de l'œsophage peut se présenter sous différentes formes:
Selon le type histologique

  • La majorité des cancers de l'œsophage sont des cancers épidermoïdes, développés à partir de l'épithélium.
  • L'adénocarcinome est plus rare (20 à 30 % des cas) et siège plutôt à la partie basse.
  • Les autres types de cancers sont exceptionnels : indifférenciés à petites cellules, sarcomes, lymphome…

Selon le siège Le cancer peut être situé au niveau de l'œsophage cervical, thoracique ou abdominal.


III. Facteurs de risque

Des facteurs de risque du cancer de l'œsophage ont été mis en évidence : 90 % des cas de cancer de l'œsophage sont imputables à la consommation de tabac et d'alcool, l'action de deux se renforçant mutuellement. Plus les consommations sont importantes et prolongées, plus le risque de cancer augmente. L'absorption de boissons encore brûlantes, comme le thé, en quantités importantes et régulières, peut entraîner des micro-traumatismes de l'œsophage susceptibles de favoriser également la survenue de ce cancer. Le rôle des radiations ionisantes est suggéré : après une radiothérapie thoracique, il existe un faible risque de cancérisation à long terme de l'œsophage.
Certaines lésions chroniques de l'œsophage prédisposent au cancer de l'œsophage :

  • des lésions cicatricielles après brûlure caustique, surtout en cas de sténose
  • l'endo-brachy-œsophage (anomalie du cardia, point de jonction entre l'œsophage et l'estomac), une lésion secondaire à un reflux gastro-oesophagien chronique, a un risque de dégénérescence en adénocarcinome
  • le méga-œsophage (ou achalasie) : il s'agit d'un dysfonctionnement de l'œsophage qui entraîne des difficultés de déglutition à l'origine d'une stagnation des aliments dans l'œsophage, qui se dilate exagérément
  • le syndrome de Plummer-Vinson, très rare, se caractérisant par une anémie accompagnée d'un taux de fer bas dans le sang. Il associe une atteinte des phanères (peau, ongles, cheveux) et des muqueuses, de l'œsophage en particulier


IV. Prévention

D'abord et avant tout :

  • en supprimant le tabac : une aide est souvent nécessaire. Votre médecin traitant ou une consultation antitabac peut assurer votre prise en charge. En fonction de votre dépendance à la nicotine et de vos souhaits, diverses méthodes (patchs, gommes, etc.) vous seront proposées.
  • en diminuant la consommation d'alcool : une aide médicale peut aussi être bénéfique dans ce cas. La suppression totale du tabagisme et une consommation modérée de boissons alcoolisées (moins d'1/2 litre de vin par jour) permettraient d'éviter environ 90 % des cancers de l'œsophage.

mais aussi en consultant rapidement, en cas de signe suspect, notamment de difficultés de déglutition.
En effet, des lésions bénignes peuvent dégénérer. Leur traitement évitera un cancer.


V. Symptômes

Le cancer de l'œsophage ne donne pas de signes cliniques au début. Il peut alors être découvert de façon fortuite, dans le cadre d'un bilan pour un cancer ORL par exemple ou chez une personne présentant une cirrhose du foie.Tout signe d'appel oesophagien peut révéler un cancer. Le signe le plus important est la dysphagie : il s'agit d'une sensation de gêne lors de la déglutition qui traduit l'existence d'un obstacle oesophagien. Cette dysphagie doit alerter lorsqu'elle est récente et évolue rapidement. Les autres signes apparaissent généralement plus tardivement : douleurs thoraciques, derrière le sternum épigastralgies (douleurs situées au-dessus du nombril) altération de l'état général (fatigue, amaigrissement) hématémèse (vomissements de sang) dysphonie (changement de tonalité des sons émis), due à une paralysie du nerf laryngé par envahissement tumoral Diagnostic.

Quelles que soient les circonstances de découverte, le diagnostic repose sur l'endoscopie qui permet de faire des biopsies afin de préciser le type histologique du cancer. Le transit baryté oesophagien permet de déterminer le siège et l'étendue de la lésion. D'autres examens sont réalisés pour faire un bilan de l'extension du cancer et de l'état de santé du malade. Ils ne sont pas tous effectués de façon systématique mais en fonction des caractéristiques propres à chaque malade. l'endoscopie trachéobronchique permet de rechercher un envahissement ou un cancer associé. le scanner thoracique évalue l'extension éventuelle aux organes de voisinage et les métastases pulmonaires. l'échoendoscopie, en visualisant les couches de la paroi de l'œsophage, permet un bilan plus précis de l'extension que le scanner.
Au terme de ce bilan, le cancer peut être classé en différents stades selon la classification T.N.M., système international de classification des tumeurs malignes. La lettre "T", pour tumeur, précise son extension locale ; la lettre "N", pour node (adénopathie ou ganglion lymphatique augmenté de volume) fait le point sur l'état des adénopathies régionales ; la lettre "M" désigne les métastases. Cette classification permet de déterminer le traitement qui sera le mieux adapté au malade. Le bilan général permet d'apprécier l'opérabilité du malade et repose sur trois facteurs importants :
la fonction respiratoire
le retentissement nutritionnel, jugé sur la perte de poids
la fonction hépatique
Le pronostic du cancer de l'œsophage est lié à l'extension de la tumeur, à l'existence d'un envahissement ganglionnaire et à la présence de métastases. L'état des fonctions respiratoires, cardiaques et hépatiques est également important à prendre en compte.


VI. Traitements

Le traitement du cancer de l'œsophage repose avant tout sur la chirurgie. L'intervention est une oesophagectomie, consistant à retirer la tumeur et les portions de l'œsophage adjacentes. Le rétablissement de la longueur du tube digestif est obtenu en faisant remonter l'estomac dans le thorax ou parfois le colon (figures 1,2,3 et 4). Quand il existe une contre-indication à l'intervention chirurgicale, le traitement comporte une destruction de la tumeur par utilisation du laser ou du plasma argon, ou la mise en place d'une prothèse œsophagienne(figure 5), ou encore des dilatations de l'œsophage par endoscopie.

La radiothérapie, la chimiothérapie ou leur association ont des indications qui se discutent au cas par cas. La chimiothérapie a beaucoup progressé. Elle est parfois proposée avant l'intervention

    

    

 

I. Complications post-opératoires

- Le risque majeur de l’intervention de LEWIS SANTY est la fistule anastomotique, autrement dit la fuite de salive passant dans l’œsophage, ou d’aliments à travers la suture entre l’œsophage et l’estomac (suture non étanche). Cette fistule peut entraîner une médiastinite (infection de la partie centrale du thorax). Une fistule peut imposer en urgence la mise en place d’un stent (ressorts) par les voies naturelles, afin d’obstruer le trou de la couture, et /ou une ré intervention en urgence. La mise en place de stent s’effectue sous anesthésie générale, par nos confrères gastro entérologues .

Dans quelques cas, en cas d’échec de la mise en place du stent, une ré intervention est nécessaire. Ce risque de fistule anastomotique représente 3 à 7 % des chirurgies œsophagiennes et persiste les 8 premiers jours postopératoires. 

- Le 2ème risque majeur est la nécrose du transplant gastrique : la partie inférieure de l’estomac raboutée à l’œsophage, est alimentée par le sang uniquement par une artère et une veine. Dans certaines circonstances, cette artère ou cette veine peut se boucher ce qui a pour conséquence une souffrance et donc une nécrose de l’estomac restant. Une intervention en urgence est donc nécessaire : l’ablation de l’estomac restant.

- La chirurgie de LEWIS SANTY est une chirurgie potentiellement contaminante, en raison des bactéries contenues dans l’œsophage et la partie inférieure de l’estomac. Cette chirurgie expose donc à un risque :

  • d’abcès de paroi (abcès de cicatrice, tant au niveau du thorax que de l’abdomen).
  • d’abcès intra abdominal (abcès à l’intérieur de l’abdomen) pouvant nécessiter des antibiotiques voire un drainage (évacuation au travers de la peau).
  • d’abcès intra thoracique pouvant nécessiter un drainage (évacuation de l’abcès).

- Les autres complications de la chirurgie œsophagiennes sont inhérentes à tout acte de chirurgie lourde (hémorragie, infection, phlébite ou embolie).

- La complication infectieuse la plus fréquente est l’infection pulmonaire, en raison de la proximité entre l’œsophage-estomac et le poumon. Ces infections pulmonaires, ou pneumonies, sont généralement traitées par antibiothérapie, oxygénothérapie et kinésithérapie respiratoires.

- Des vomissements spontanés, même en présence d’une sonde gastrique qui a pour but de vider le contenu gastrique, peuvent entrainer une grave souffrance pulmonaire appelé SDRA. Le mécanisme de lésion des poumons par régurgitation de liquide gastrique est connu sous le nom de syndrome de MEDELSON. 


B- Certaines complications peuvent subvenir pendant l’intervention :

  • Une réaction à l’anesthésie,
  • Un saignement,
  • Une blessure d’organe abdominal, comme la rate, organe situé au contact de l’estomac et nécessitant quelquefois une splénectomie d’hémostase (ablation de la rate pour saignements).
  • L’estomac restant n’étant alimenté que par une seule artère et une veine, il peut arriver dans de très rare cas que cette vascularisation ne soit pas suffisante pour une bonne vitalité du transplant. Dans ce cas le rétablissement immédiat entre l’œsophage et l’estomac ne sera pas
    possible et il sera nécessaire de remplacer l’estomac par le colon secondairement.
  • Certains risques peuvent être inhérents à l’anesthésie générale (comme une embolie pulmonaire, une attaque cérébrale, un infarctus, ou une paralysie d’un membre par compression nerveuse).


C- En résumé :

  • Lorsqu’une complication est constatée durant l’intervention, elle peut être traitée dans la plupart des cas pendant l’intervention. En ce qui concerne les complications postopératoires, des précautions seront prises, pour parer à tout(s) problème(s) éventuel(s) postopératoire(s) pouvant être évité(s).
  • Pour cela, un bilan pré opératoire, consultation anesthésie et pré anesthésie, complété systématiquement d’une consultation cardiologique et pneumologique.
  • Lors de l’hospitalisation, un des chirurgiens de l’équipe est joignable 24 / 24 H, weekend et jours fériés compris.
  • Des visites quotidiennes chirurgicales sont systématiques.
  • Un médecin urgentiste, un anesthésiste, un réanimateur et un cardiologue sont présents sur place nuit et jour à la Clinique St Pierre.
  • En post-opératoire immédiat, vous serez hospitalisé(s) directement dans le service de réanimation chirurgicale, où vous serez constamment surveillé(s) par une équipe para médicale spécialisée et le réanimateur.
  • Il sera envisagé un transfert en service de surveillance continue, puis secondairement dans une chambre classique.


II. Effets indésirables

L'intervention chirurgicale va généralement nécessiter une rééducation respiratoire pour permettre au patient de retrouver une capacité respiratoire suffisante.
Les médicaments de la chimiothérapie ont en commun d'entraîner certains effets secondaires, plus ou moins accentués selon les produits. Ils régressent avec l'arrêt des produits, mais peuvent être prévenus ou corrigés lors de leur apparition:

  • les nausées et vomissements : redoutés par les malades, ils sont heureusement aujourd'hui moins intenses grâce aux médicaments utilisés et à l'action préventive d'antiémétiques puissants (médicaments qui empêchent les vomissements).
  • la diarrhée : il faut boire abondamment eau, thé, bouillon ou des boissons gazeuses pour éviter tout risque de déshydratation. En cas de persistance, des médicaments antidiarrhéiques peuvent être prescrits.
  • la constipation : assez fréquente, elle est liée à la chimiothérapie, aux médicaments antiémétiques ou encore à l'inactivité physique. Elle sera soulagée par un traitement spécifique.
  • les aphtes : relativement rares, ils varient selon les protocoles de chimiothérapie utilisés. On parle aussi de "mucite buccale". Ils seront prévenus par des bains de bouche après les repas. Lorsqu'ils sont nombreux, ils peuvent être la conséquence d'une diminution du nombre de globules blancs, dont le taux doit alors être contrôlé par une prise de sang.
  • la chute de cheveux ou alopécie : elle est fréquente mais pas systématique. Elle est le plus souvent progressive, démarrant 2 à 3 semaines après la première perfusion. Elle est temporaire, les cheveux repoussant toujours à la fin de la chimiothérapie. Selon les médicaments utilisés, on peut proposer le port d'un casque réfrigérant pendant la séance de chimiothérapie, mais il faut savoir que son efficacité est variable.
  • la diminution de certains globules blancs : le nombre des polynucléaires neutrophiles diminue souvent (neutropénie). Généralement de courte durée, cette diminution est sans conséquence. Cependant, une surveillance par prises de sang régulières est effectuée. En cas de chute trop importante (aplasie), la malade court alors un risque d'infection.
  • la diminution des globules rouges : appelée aussi anémie, elle peut survenir en fin de traitement. Elle peut être responsable d'une fatigue importante. la diminution des plaquettes ou thrombopénie : elle entraîne un risque d'hémorragie en cas de coupure accidentelle, car les plaquettes permettent la coagulation du sang.
  • la fatigue : c'est un effet secondaire fréquent de la chimiothérapie. La fatigue est en réalité liée à plusieurs facteurs : la maladie elle-même, les traitements associés entre eux, la baisse des globules rouges lors de la chimiothérapie, mais aussi le stress et l'angoisse.
  • une irrégularité des règles, voire même leur arrêt : c'est une complication assez fréquente de la chimiothérapie, chez la femme non ménopausée. Cet arrêt est transitoire et les règles réapparaissent généralement dans les mois qui suivent l'arrêt du traitement. La détresse psychologique qui peut accompagner votre maladie est aujourd'hui mieux comprise et considérée. Pour mieux vivre avec sa maladie, il est essentiel d'avoir des explications et des informations pour comprendre. L'équipe soignante, les médecins psychiatres ou les psychologues sont à même d'apporter au malade une aide morale précieuse. Il est important d'établir une bonne relation avec le médecin, le conjoint et les proches pour conserver un équilibre psychologique. Les associations de patients sont également très utiles car elles permettent de rencontrer des personnes ayant vécu les mêmes expériences et qui peuvent donc donner des conseils avisés.



III. Suivi

Plus le cancer est détecté précocement, plus les chances de guérir sont importantes. Cependant, chaque cas est particulier et les chances de guérison doivent être estimées à partir de l'ensemble des résultats.  La surveillance clinique doit être prolongée et régulière pour dépister une éventuelle récidive de la maladie. Le malade est revu tous les 3 mois pendant 2 ans, puis tous les 6 mois. Même si vous avez eu un cancer, l'arrêt de la consommation d'alcool et de tabac est bénéfique et permet de diminuer le risque de récidive. Si vous avez, après le traitement, des difficultés à vous alimenter, il est important que vous assuriez un apport calorique suffisant : demandez à votre médecin, si besoin, qu'il vous oriente vers un nutritionniste afin qu'il vous conseille. En période aiguë, il peut arriver que l'on vous propose, pendant quelque temps, des compléments nutritionnels et vitaminiques, voire une alimentation par sonde ou par perfusions. La reprise d'une activité physique est possible, mais doit se faire très progressivement.

La réinsertion socio-professionnelle après la maladie a pour but d'aider le patient et sa famille dans sa vie quotidienne. L'aide d'une assistante sociale pendant la maladie peut permettre au malade d'éviter ou de résoudre certaines difficultés pendant les hospitalisations, mais aussi après les traitements. Un tel suivi facilite la reprise d'une vie normale. A noter que les associations d'anciens patients et de bénévoles peuvent également aider le malade par leur expérience et lui apporter des conseils adaptés et des adresses utiles. En ce qui concerne la reprise du travail, l'idéal, si l'organisation professionnelle le permet, est de reprendre progressivement le travail, à temps partiel par exemple. La loi prévoit d'ailleurs des aménagements du temps du travail. Là encore, il est conseillé de s'adresser à une assistante sociale, car les dispositions dépendent de nombreux facteurs (situation particulière, employeur, Caisse de Sécurité sociale).

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Le cancer de l’estomac

Publié dans Cancérologie digestive et gynécologique

I. Introduction

L'estomac est un organe creux qui a la forme d'un réservoir. Il est situé dans la région épigastrique, dans la partie supérieure de l'abdomen. Il fait suite à l'œsophage avec lequel il communique par l'intermédiaire du cardia et se poursuit par le duodénum auquel il est relié par le pylore. L'estomac est un réservoir qui reçoit les aliments provenant de l'œsophage. Les glandes de la muqueuse gastrique agissent sur la digestion en sécrétant des sucs : l'acide chlorhydrique et la pepsine. L'estomac produit également le "facteur intrinsèque", substance qui permet à la vitamine B12 d'être absorbée dans l'intestin (une carence en vitamine B12 est à l'origine d'une anémie). Les aliments, fragmentés sous l'effet des sucs gastriques, sont brassés et évacués vers le duodénum sous l'effet des contractions des muscles de la paroi gastrique.

Le cancer de l’estomac se manifeste par des douleurs situées au milieu de l’abdomen dont les caractéristiques sont très variables. Une altération de l’état général est souvent associée.

Devant ces symptômes votre médecin doit demander une fibroscopie gastrique qui permet de visualiser la tumeur, de préciser son siège dans l’estomac et de faire des biopsies dont seuls les résultats permettent de faire le diagnostic de cancer. Si celui-ci est confirmé il faudra faire un scanner thoraco abdominal pour rechercher des métastases ou une extension locale de la tumeur. Le bilan sanguin comprendra un dosage de l’antigène carcino embryonnaire (ACE) et du CA 19-9 qui sont des marqueurs sanguins témoignant de la présence d’une tumeur.

Le seul traitement pouvant guérir un patient souffrant d’un cancer de l’estomac est chirurgical. Le type de gastrectomie réalisée est fonction du siège de la tumeur.

  • En cas de tumeur situé au niveau de l’antre (siège distal) la gastrectomie sera partielle (deux tiers ou 4 cinquième de l’estomac. )
  • En cas de tumeur situé au niveau du corps gastrique (siège proximal) la gastrectomie sera totale. Afin d’améliorer le caractère curateur de la gastrectomie il faudra associer à l’exérèse un curage ganglionnaire.

On peut constater une régression nette et générale de ce type de cancer en Europe et aux Etats-Unis en particulier en raison des modifications de l’environnement et de l’évolution des habitudes de vie (utilisation du réfrigérateur, augmentation de la consommation de vitamines et amélioration dans le traitement de l’eau).
Le pronostic du cancer de l'estomac est lié aux résultats de la chirurgie (existence ou non de tumeur résiduelle et extension ganglionnaire).


II. Types de cancers

Dans la majorité des cas (95 % des cas), il s'agit d'un adénocarcinome, développé aux dépens des glandes de la muqueuse gastrique. Ce cancer peut parfois compliquer un ulcère de l'estomac. En fait, deux types d’adénocarcinome gastrique peuvent être distingués selon leur localisation :

  • les adénocarcinomes du cardia et
  • les adénocarcinomes de l’estomac distal.

L’adénocarcinome du cardia a une incidence qui reste stable ou en légère augmentation. Il se développe indépendamment de l’infection par H. pylori et serait favorisé par le RGO. L’adénocarcinome de l’estomac distal a une incidence qui diminue nettement et est lié à la gastrite atrophique induite par H. pylori. L’autre cause de gastrite chronique pouvant favoriser la survenue d’un cancer est la maladie de Biermer (atrophie fundique).

  • Beaucoup plus rares sont les lymphomes malins non hodgkiniens, les tumeurs conjonctives et les tumeurs endocrines.
  • La linite plastique est une forme particulière de cancer de l'estomac, correspondant à un adénocarcinome peu différencié.


III. Facteurs de risque

Avec environ 9.000 nouveaux cas par an, le cancer de l'estomac se situe au cinquième rang des cancers en France. Sa fréquence a cependant diminué au cours des vingt dernières années. Son âge moyen de survenue est de 70 ans et touche les hommes dans 6 cas sur 10. Des facteurs de risque du cancer de l'estomac ont été mis en évidence :

L'alimentation joue un rôle important : une consommation excessive de viandes, de poissons fumés ou de sel augmente le risque de cancer gastrique.

  • Le tabac favorise le développement de nombreux cancers, dont celui de l'estomac.
  • L'infection par Helicobacter pylori : la gastrite atrophique, inflammation chronique de l'estomac, induite par la bactérie Helicobacter pylori, augmente le risque de cancer de l'estomac. La diminution de fréquence de cette gastrite, grâce à l'amélioration des règles hygièno-diététiques, a contribué à la baisse de l'incidence de l'adénocarcinome gastrique.
  • Certaines maladies sont également des facteurs prédisposants, comme la maladie de Biermer, la maladie de Ménétrier et les adénomes gastriques mais de très faible prévalence.
  • le reflux bilieux gastrique (notamment en cas de gastrectomie partielle avec anastomose gastro-jéjunale).


IV. Prévention

Mieux manger contribue à diminuer de façon significative le risque de survenue de certains cancers, dont celui de l'estomac :

  • moindre consommation de viandes, et notamment de charcuterie, diminution de la consommation en sel, moins d'aliments fumés (poissons ou viandes),
  • mais davantage de fruits et de légumes : leur effet protecteur vis-à-vis de certains cancers dont celui de l'estomac a été prouvé. Il est recommandé de manger chaque jour au moins 5 fruits et légumes (frais, surgelés ou en conserve).
  • L'arrêt du tabac est impératif. Pour cela, une aide peut être nécessaire. Votre médecin traitant ou une consultation antitabac peuvent assurer votre prise en charge. En fonction de votre dépendance à la nicotine et de vos souhaits, diverses méthodes (patchs, gommes, etc.) vous seront proposées.


V. Diagnostic

Les symptômes pouvant révéler un cancer de l'estomac sont généralement tardifs et non spécifiques .
Au début, le cancer de l’estomac ne provoque  peu de symptômes.
De plus les symptômes du cancer de l’estomac ne sont jamais caractéristiques ce qui rend le diagnostic précoce encore plus difficile. Lorsqu’il existe, le symptôme le plus fréquent est une douleur située à la partie haute et médiane du ventre.

les circonstances révélatrices du cancer gastrique
La sémiologie clinique du cancer gastrique est non spécifique. Les signes d’appel peuvent être :

– un syndrome ulcéreux ;

– un syndrome dyspeptique ou une anorexie ;

– une complication hémorragique, une perforation... ;

  •   une altération de l’état général ; Parfois aussi un amaigrissement, une présence de sang dans les selles rendant les selles noires.
  •   une anémie ;

– une phlébite ;

– une métastase (hépatique, ganglionnaire, pulmonaire...).
    Les adénocarcinomes situés au niveau des orifices (cardia ou pylore) peuvent, de plus, se manifester par
    un syndrome obstructif (dysphagie, vomissements
    Le diagnostic de cancer de l'estomac repose sur l'examen endoscopique de
    l'estomac ou gastroscopie qui permet de visualiser la lésion et son étendue. Des biopsies sont effectuées au niveau des zones suspectes et l'examen histologique des prélèvements permet d'affirmer la nature cancéreuse de la lésion et son type.


On peut parfois, mais rarement maintenant, faire une radiographie de l'estomac à l'aide d'une substance opaque (transit baryté). L'échoendoscopie est un examen hautement spécialisé qui permet d'étudier la paroi en profondeur et de déterminer l'éventuelle présence de ganglions pathologiques.

Un bilan d'extension est alors effectué qui comporte :

  • une échographie abdominale, à la recherche de métastases hépatiques et d'adénopathies intra-abdominales,
  • éventuellement, un scanner abdominal et thoracique.Au terme de ce bilan, le cancer est classé en différents stades selon la classification T.N.M., système international de classification des tumeurs malignes. La lettre "T", pour tumeur, précise son extension locale ; la lettre "N", pour node (adénopathie ou ganglion lymphatique augmenté de volume) fait le point sur l'état des adénopathies régionales ; la lettre "M" désigne les métastases.

 

VI. Traitements

Le seul traitement curatif du cancer de l'estomac est chirurgical :
Une gastrectomie peut être réalisée par une laparotomie  ou par cœlioscopie après une exploration complète de la cavité abdominale.La section distale porte toujours sur le duodénum après le  pylore.
La section proximale, à un niveau variable, laissant en place un moignon gastrique plus ou moins important.

En cas de gastrectomie totale la section proximale porte sur le cardia.

La gastrectomie partielle est possible en cas de cancer distal .

Après avoir retiré tout ou partie de l’estomac, il faut rétablir la continuité du tube digestif. Le raccordement peut se faire  entre l’estomac résiduel et la section duodénale. Il s’agit de la technique dite de Péan.

Il peut également se faire entre l’estomac et l’intestin grêle en fermant le moignon duodénal. Il s’agit de la technique de Finsterer.

Avant gastrectomie partielle                   Après gastrectomie partielle


Gastrectomie totale, nécessaire pour les cancers de la partie supérieure de l'estomac et du cardia ; un curage ganglionnaire est associé à l'exérèse gastrique. L'extension de l'exérèse à la rate, au pancréas voire au côlon n'est envisagée qu'en cas de nécessité.

En cas de gastrectomie totale la section proximale porte sur le cardia. En cas de gastrectomie totale on ferme le moignon duodénal. Une anse grêle de 60 cm de long (dite anse en Y) est isolée pour être anastomosée à l’œsophage.

Avant gastrectomie totale                  Après gastrectomie totale


Des travaux récents ont montré qu’une chimiothérapie réalisée avant l’intervention (chimiothérapie néoadjuvante) et continuée après l’intervention (chimiothérapie adjuvante) permet d’améliorer les résultats en diminuant le taux de récidive.

  • Le traitement palliatif du cancer de l'estomac peut comporter :
  • l'exérèse de la tumeur gastrique lorsqu'elle est possible, dans le but d'éviter les complications
    (obstruction, hémorragie) ;
  • la radiothérapie, la chimiothérapie ou leur association ont des indications qui se discutent au cas par cas.


VII. Effets indésirables

Le fait de retirer une partie ou la totalité de l'estomac entraîne des conséquences sur la digestion.

  • Le "dumping syndrome" se manifeste, après la prise d'aliments, par un malaise général, une fatigue brutale et une gêne épigastrique. Il est lié à l'arrivée trop rapide des aliments dans l'intestin.
  • Le syndrome du "petit estomac" est une sensation de plénitude à la fin du repas. Il est combattu en réduisant le volume des repas qui doivent alors être plus nombreux.
  • Une hypoglycémie (baisse du taux de glucose dans le sang) peut se manifester 2 à 3 heures après le repas. Elle est toujours due à un excès d'apports en glucides d'absorption rapide.
  • Le risque de survenue d'une diarrhée dépend du type d'intervention chirurgicale qui a été effectué : élevé en cas de gastrectomie totale, moins important en cas de gastrectomie partielle. La diarrhée est provoquée par une arrivée rapide du bol alimentaire dans l'intestin grêle (accélération du transit intestinal). Elle régresse généralement en quelques mois.
  • Une anémie peut survenir chez les personnes qui ont subi une gastrectomie totale, en raison d'une carence en vitamine B12. C'est pourquoi ces malades doivent recevoir un traitement par vitamine B12 administré par voie intramusculaire tous les trois mois. Une carence en fer peut également entraîner une anémie en cas de gastrectomie partielle.La plupart de ces complications de la chirurgie gastrique sont prévenues ou améliorées par des règles hygiéno-diététiques reposant essentiellement sur :
  • des apports énergétiques et protéiques suffisants ;
  • des repas fractionnés et peu abondants, au nombre de cinq au moins par jour ;
  • la suppression des sucres rapides ;
  • l'arrêt des boissons gazeuses et alcoolisées. Les effets secondaires de la radiothérapie consistent essentiellement en :
  • Une rougeur de la peau : c'est la réaction la plus fréquente après deux semaines de traitement. On parle alors d'"effet coup de soleil". L'application quotidienne d'éosine permet d'éviter que la peau ne pèle.
  • Une fatigue : elle est fréquente après une ou deux semaine de traitement, mais transitoire.


VIII. Suivi

Plus le cancer est détecté précocement, plus il pourra être traité efficacement. Cependant, chaque cas est particulier et les chances de guérison doivent être estimées à partir de l'ensemble des résultats.
Vous reverrez régulièrement les médecins de l'équipe qui vous ont pris en charge, mais aussi votre généraliste. Cette surveillance repose sur :

  • l'examen clinique, notamment du foie et de la région sus-claviculaire où sont situés les ganglions le plus susceptibles d'être envahis par la tumeur ;
  • la surveillance de l'état nutritionnel ;
  • la réalisation d'examens complémentaires : examens sanguins, endoscopie, échographie, radiographies.
  • Une surveillance est également nécessaire pour dépister une éventuelle récidive de la maladie. Les risques de rechute sont liés à la localisation de la tumeur, à son extension locale et régionale, à l'existence et au nombre de ganglions envahis par des cellules cancéreuses.


IX. Que se passe-t-il après le traitement ?

  • Si vous avez, après le traitement, des difficultés à vous alimenter, il est important que vous assuriez un apport calorique suffisant : demandez à votre médecin, si besoin, qu'il vous oriente vers un nutritionniste afin qu'il vous conseille.
  • La réinsertion socio-professionnelle après la maladie a pour but d'aider le patient et sa famille dans sa vie quotidienne. L'aide d'une assistante sociale pendant la maladie peut permettre au malade d'éviter ou de résoudre certaines difficultés pendant les hospitalisations, mais aussi après les traitements. Un tel suivi facilite la reprise d'une vie normale. A noter que les associations d'anciens patients et de bénévoles peuvent également aider le malade par leur expérience et lui apporter des conseils adaptés et des adresses utiles. En ce qui concerne la reprise du travail, l'idéal, si l'organisation professionnelle le permet, est de reprendre progressivement le travail, à temps partiel par exemple. La loi prévoit d'ailleurs des aménagements du temps du travail. Là encore, il est conseillé de s'adresser à une assistante sociale, car les dispositions dépendent de nombreux facteurs (situation particulière, employeur, Caisse de Sécurité sociale).
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Les Cancers du foie

Publié dans Cancérologie digestive et gynécologique

 

 

 

Les indications des hépatectomies sont dominées par l’exérèse de lésions malignes (tumeurs primitives du foie ou métastases). L’exérèse de lésions bénignes est plus rare, elle est indiquée en cas de lésion symptomatique ou à haut risque de dégénérescence

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Le cancer primitif du foie

Publié dans Cancérologie digestive et gynécologique

Introduction

le CHC est un cancer primitif du foie qui se développe à partir des cellules du foie.

Il survient dans la quasi-totalité des cas sur un foie anormal, fréquemment atteint de maladie chronique souvent au stade de cirrhose. Toutes les causes de maladie chronique du foie sont donc responsables, directement ou indirectement, de CHC. Les causes les plus fréquentes sont l'infection par le virus de l'hépatite B, le virus de l'hépatite C, l'intoxication alcoolique et la stéatohépatite non alcoolique (NASH). Le diabète et l'obésité, causes de la NASH, sont aussi indirectement responsable de CHC. Le CHC sur foie sain existe mais il est exceptionnel.

 

Epidémiologie

Le carcinome hépatocellulaire est le cancer primitif du foie le plus courant. C'est la 5ème cause de cancer dans le monde et la 3ème cause de mortalité par cancer. Entre 1980 et 1994, la France et l'Italie sont les 2 pays européens où l'incidence du CHC a le plus augmenté (+ 93% en France et + 45% en Italie, chez l'homme). Depuis 1994, cette progression a diminué un peu en France (- 1.7% chez l'homme) et beaucoup en Italie (- 17.4% chez l'homme). De 2000 à 2004, la France était le pays européen où l'incidence du CHC était la plus élevée : 6.7 cas / 100 000 habitants (Homme) et 0.96 / 100 000 habitants (Femme). Entre 1998 et 2002, autour de 900 malades par an sont morts de cette maladie en Ile de France.

Avant 2000, l'augmentation importante de l'incidence du CHC s'explique par l'amélioration des méthodes de détection de la maladie et par l'épidémie d'hépatites B et C. Après 2000, le contrôle de l'épidémie d'hépatite B et la baisse de la consommation d'alcool ont participé à la diminution de l'incidence de la maladie, mais le pic de fréquence de CHC lié au virus de l'hépatite C est attendu pour 2010 en France.

Depuis 1996, avec l'efficacité des traitements anti-rétroviraux chez les patients infectés par le VIH et l'augmentation de leur survie, l'incidence du CHC est en augmentation dans cette population souvent co-infectée par le virus de l'hépatite B et/ou celui de l'hépatite C. L'obésité, qui a augmenté de 8.6% en 1997 à 13% en 2006 dans la population française et est responsable de la NASH, est devenu un nouveau facteur de risque de CHC.

A une échelle nationale, la meilleure connaissance des mécanismes de développement du CHC et de ses facteurs de risques a incité à mettre en place des programmes de surveillance des paramètres biologiques et morphologiques chez les patients concernés afin de détecter la maladie à un stade plus précoce.


Le diagnostic

Le CHC est souvent découvert dans le cadre du bilan initial ou de la surveillance d'une hépatopathie chronique, et parfois au cours de l'exploration de signes cliniques en rapport avec le cancer. Comme toutes les tumeurs du foie, il peut être découvert par hasard, par exemple lors d'une radio ou d'un scanner prescrit pour une autre raison.


Les signes cliniques du CHC

La présence de signes cliniques directement dus au cancer témoigne souvent d'un CHC évolué. Souvent, à un stade tardif, le CHC peut obstruer la veine porte et/ou les canaux biliaires. En conséquence, c'est une jaunisse (ictère) et parfois un épanchement liquidien intra-abdominal (ascite) qui fait découvrir un CHC très évolué. Il arrive aussi que la maladie soit découverte suite à une hémorragie interne par rupture d'une tumeur à la surface du foie. Exceptionnellement, la tumeur est découverte à la palpation d'une masse abdominale.


Les signes biologiques du CHC

L'alphafoetoprotéine (AFP) est une protéine qui est sécrétée dans le sang par environ la moitié des CHC. Le CHC n'est pas la seule cause d'augmentation de l'AFP cependant l'on considère qu'un taux sanguin supérieur à 400 ng/ml (le taux normal est inférieur à 7 ng/ml), en présence d'un nodule du foie et de facteurs de risque d'hépatopathie chronique, est suffisant pour affirmer le diagnostic de CHC.


Les signes radiologiques du CHC

Le diagnostic de CHC est de plus en plus souvent radiologique car cette tumeur est souvent découverte lors du diagnostic ou de la surveillance d'une hépatopathie chronique.

La particularité du CHC est d'être une tumeur dite « hypervasculaire », c'est-à-dire qu'elle se remplit et se vide rapidement de sang artériel. Une autre caractéristique est, dans certains cas, la présence de graisse au sein de la tumeur. A un stade plus avancé, la tumeur a la particularité d'envahir les gros vaisseaux du foie (veine porte droite ou gauche) en envoyant dans ces veines des « bourgeons » tumoraux qui obstruent et remontent « à contre-courant » l'axe vasculaire digestif principal.

Chez des patients avec une hépatopathie chronique et un nodule suspect de CHC de moins de 2 cm de diamètre, le diagnostic doit reposer sur au moins 2 examens radiologiques différents. Ces examens peuvent être une échographie abdominale, un scanner abdominal injecté, une imagerie par résonance magnétique ou une échographie avec injection de produit de contraste. Au dessus de 2 cm de diamètre et/ou en présence d'un dosage d'AFP supérieur à 400 ng/ml, un seul examen suffit à porter le diagnostic.

En pratique, l'échographie permet le dépistage, le scanner abdominal confirme l'image vue en échographie et l'IRM et/ou l'échographie de contraste affirme le diagnostic de CHC en cas de doute au scanner.

Après le diagnostic, les mêmes examens peuvent permettre d'apprécier l'évolution de la maladie et les effets des différents traitements. L'efficacité d'un traitement est principalement évalué par la persistance ou non d'une hypervascularisation au sein du nodule qui témoigne de sa vitalité.


Le traitement du CHC

Le traitement du CHC est indispensable sous peine d'une évolution toujours fatale. Il doit cependant tenir compte de la cause et de la gravité de la maladie hépatique sous-jacente. On cherche toujours à traiter parallèlement la cause de la maladie hépatique si ce traitement existe et est envisageable. C'est la gravité de la maladie hépatique sous-jacente, évalué par le score de CHILD et/ou de MELD, et l'extension du cancer qui vont dicter les possibilités thérapeutiques.
Les moyens thérapeutiques employés contre le CHC sont la transplantation hépatique , la chimioembolisation , la radiofréquence , la résection chirurgicale et la chimiothérapie.


La transplantation

Le meilleur traitement du CHC est de manière quasi-certaine la transplantation hépatique car il traite à la fois la maladie cancéreuse et sa cause, la cirrhose. Les limites de ce traitement sont celles de la faible disponibilité des greffons hépatiques qui doivent être prélevés sur un donneur en mort cérébral mais avec une activité cardiaque persistante. Dans ce contexte de pénurie d'organe, il a été établi des régles d'attribution afin que les malades transplantés pour CHC sur cirrhose aient les mêmes résultats que les malades transplantés pour cirrhose sans CHC. Ainsi, la transplantation hépatique est devenu « éthiquement» raisonnable car elle ne «gachait» pas des greffons qui aurait été beaucoup plus «rentables» en terme d'année de vie gagnés chez des patients sans cancer.

Ces régles d'attribution des greffons ont été initialement décrites au Centre Hépato-Biliaire en 1994 puis ensuite réevaluées à plus grande échelle par une équipe Italienne de Milan en 1996. Ces critères dits « de Milan » sont toujours utilisés partout dans le monde sauf en Asie.

Des critères internationaux (les "critères de Milan") définissent les conditions d'attribution d'un greffon hépatique aux patients atteints de CHC sur cirrhose : une transplantation hépatique est autorisée si un malade présente 2 ou 3 nodules dont le plus gros fait au maximum 3 centimètres, ou 1 nodule unique d'au maximum 5 centimètres. Si ces critères sont confirmés par l'analyse histologique du foie malade retiré (foie explanté), le risque de dissémination tumorale en dehors du foie est extrêmement faible et le taux de survie des patients 10 ans après la transplantation est de l'ordre de 60-70%.

Dans plus d'un tiers des cas, malheureusement, ces critères sont dépassés sur le foie explanté et le taux de survie observé 10 ans après la transplantation est de l'ordre de 50%. Les causes du dépassement des critères peuvent être une mauvaise évaluation du nombre et de la taille des nodules de CHC sur le bilan initial et/ou une évolution de la maladie cancéreuse lors de l'attente de la transplantation hépatique qui peut aller jusqu'à 1 an.

Pour pallier ce problème, il est nécessaire de réaliser des traitements dits "d'attente" qui permettent de freiner l'évolution de la maladie. Ces traitements sont les mêmes que ceux que l'on peut proposer à un malade en dehors d'un programme de transplantation : il s'agit de la chimioembolisation, de la radiofréquence et - exceptionnellement - de la résection chirurgicale du cancer. Ces traitements peuvent être associés entre eux et parfois répétés.


La chimioembolisation

C'est une injection de chimiothérapie par voie artérielle qui exploite le caractère hypervasculaire du CHC. Cette injection de chimiothérapie est effectuée directement dans l'artère hépatique que l'on atteint par l'aorte en faisant progresser sous contrôle radiologique un cathéter introduit au pli de l'aine, dans l'artère fémorale.

L'injection de chimiothérapie est associée à l'injection d'un produit graisseux et hydrophobe, le lipiodol, qui se mélange à la chimiothérapie et se fixe préférentiellement au niveau des cellules cancéreuses. Par ailleur, le lipiodol a la particularité d'être visible sur les clichés radiologiques, c'est un produit radio-opaque. Cette caractéristique permet d'évaluer l'efficacité du traitement : plus un nodule a « fixé » le lipiodol, plus il est spontanément visible au scanner et plus le traitement est efficace.

Chez les patients ayant un fonctionnement hépatique correct (CHILD A et/ou MELD<10), cette injection est associée à une embolisation : obstruction temporaire de l'artère hépatique elle-même ou des branches qui vascularisent la tumeur. Cette obstruction temporaire est effectuée avec des éponges microscopiques qui se délitent ensuite en 4 à 5 jours. Son intérêt est d'éviter le « lavage » du produit de chimiothérapie par le flux sanguin pour en augmenter encore l'efficacité.

L'embolisation artérielle n'est pas réalisée si le fonctionnement hépatique est trop dégradé, s'il existe une obstruction de la veine porte ou si l'artère hépatique est déjà abîmée par des traitements précédents. Dans ce cas, on effectue l'injection de chimiolipiodol sans embolisation. Enfin, l'insuffisance rénale grave est une contre-indication à la réalisation du traitement lui-même car l'injection d'iode, qui est nécessaire même pour le « chimiolipiodol sans embolisation », est dangereuse pour les reins.

La chimioembolisation est très fréquemment réalisée au Centre Hépato-Biliaire où les radiologues ont une grande expérience de cette procédure. Cette intervention nécessite une hospitalisation de 4 à 5 jours, temps nécessaire pour que l'artère se réperméabilise. Ce traitement peut être responsable de fièvre et de douleur modérée au niveau du foie avec parfois une augmentation des taux sanguins de ASAT et ALAT. Grâce à une prise en charge spécifique de la douleur, ces effets secondaires sont bien tolérés et disparaissent spontanément.

L'efficacité de ce traitement est évaluée par un scanner 1 mois après l'intervention. Sur ce scanner, on évalue la fixation du « lipiodol » au niveau du ou des nodules et la persistance ou non d'une hypervascularisation du CHC. L'intensité de la fixation est corrélée à l'efficacité du traitement. Un taux d'AFP en baisse, s'il était élévé avant le traitement, est aussi une preuve d'efficacité du traitement.

La chimioembolisation peut-être réalisée dans un programme d'attente de la transplantation ou comme traitement unique chez un patient qui ne relève pas ou pas encore de la chirurgie - patient âgé, ou présentant des tumeurs trop nombreuses pour la transplantation. Ce traitement peut-être répété plus de 10 fois avec des résultats individuels parfois très satisfaisants.


La radiofréquence

La radiofréquence est un traitement local de destruction du CHC. Ce traitement consiste à introduire, le plus souvent par ponction cutanée, une aiguille au bout de laquelle se déploient des aiguilles très fine sous la forme d'un palmier. Ces aiguilles sont déployées dans la tumeur et permettent sa nécrose thermique par l'application d'un courant électrique interne.

Le traitement est effectué au bloc opératoire sous anesthésie générale par les chirurgiens ou par les radiologues. Il nécessite une bonne visibilité de la tumeur sous échographie. Exceptionnellement, si la tumeur est difficile d'accès ou si elle est peu visible en échographie, ce traitement peut-être réalisé à l'aide d'un scanner, au service de radiologie.

Ce traitement ne peut pas être réalisé si le CHC dépasse 4 cm et surtout s'il existe plus de 2 nodules. Les autres contre-indications à ce traitement sont l'ascite, la présence d'une dilatation des voies biliaire ou un fonctionnement hépatique très dégradé (score de CHILD C).

L'efficacité de la radiofréquence est évaluée par l'imagerie et l'évolution du taux d'AFP s'il était élevé avant le traitement. C'est le scanner, l'IRM ou encore l'échographie qui permettent d'évaluer la persistance ou non d'une vascularisation du CHC afin d'appréhender la « vitalité » du cancer et donc l'efficacité ou non du traitement.

Dans l'état actuel des connaissances, il n'est pas possible de dire si la radiofréquence a ou non la même efficacité que la résection des nodules cancéreux par voie chirurgicale. Le principal avantage de la chirurgie par rapport à la radiofréquence est la possibilité d'emporter autour du cancer une marge de foie « sain » dans lequel on peut trouver des cellules cancéreuses microscopiques. La présence de ces cellules cancéreuse est d'autant plus fréquente que le cancer est gros. Donc, il est probable que la radiofréquence soit aussi efficace que la chirurgie pour les tumeurs inférieures à 3 cm où le risque d'extension microscopique dans le foie en périphérie de la tumeur est très faible. En revanche, pour des tumeurs supérieures à 3 cm, la chirurgie fait très probablement mieux que la radiofréquence. Cependant, la chirurgie (hépatectomie sur cirrhose) a une mortalité supérieure à la radiofréquence, surtout si elle emporte beaucoup de foie « sain ». De fait, c'est la localisation du cancer sur le foie qui va faire décider une hépatectomie ou une radiofréquence. Finalement, l'hépatectomie est réalisée le plus souvent pour des tumeurs superficielles alors que les radiofréquences sont réservées aux tumeurs plus profondes.


La résection chirurgicale

La résection chirurgicale du CHC qui emporte au moins 2 cm de marge de foie « sain » est un traitement très efficace du CHC superficiel. Les dangers de ce traitement sont principalement liés à l'état général des patients et surtout à leur fonction hépatique. Pour pouvoir supporter une résection de foie cirrhotique (hépactectomie sur cirrhose), les malades doivent avoir un bon fonctionnement cardiaque et respiratoire, et un fonctionnement hépatique quasi-normal (score de CHILD A, score de MELD inférieur à 10).

Chez des patients sélectionnés, la chirurgie, de préférence sous coelioscopie, apporte les meilleurs résultats après la transplantation dans le traitement du CHC supérieur à 3 cm.


La chimiothérapie intra-veineuse ou orale

Les chimiothérapies intra-veineuses classiques (systémiques), proposées depuis plusieurs années, se sont montrées peu efficaces contre le CHC. Outre la particularité tumorale, c'est souvent la maladie hépatique sous-jacente qui imposait de faibles dosages et donc une faible efficacité.

Depuis 2007, de nouvelles molécules ont fait leur apparition dans l'arsenal thérapeutique contre le CHC. Ce sont des traitements ciblés : ils agissent sur des récepteurs tumoraux spécifiques du cancer pour empêcher notamment le développement de micro-vaisseaux qui alimentent le cancer et permettent son développement. Ces nouveaux médicaments, appelés anti-angiogéniques, se prennent par voie orale et ont montré leur efficacité chez des patients ne répondant plus à la chimioembolisation et ayant une cirrhose avec un bon fonctionnement hépatique (CHILD A). En 2008, ils sont en évaluation à une échelle mondiale comme traitements adjuvants après radiofréquence ou chirurgie. Le Centre Hépato-Bilaire est activement impliqué dans cette évaluation.

 

Publication

Ann Chir. 1998;52(6):543-6.
Treatment of hepatic recurrence after resection of hepatocellular carcinomas.

[Article in French]

Sbaï-Idrissi MS, Vons C, Borgonovo G, Mariette D, Smadja C, Franco D.


Source

Service de Chirurgie Générale et Digestive, Hôpital Antoine-Béclère, Clamart.


Abstract

Between October 1990 and December 1995, 86 patients underwent hepatic resection for hepatocellular carcinoma (HCC). All resections were carried out with the aim of achieving complete cure. Fifty one (60%) of these patients subsequently developed recurrent HCC. Only twenty patients could be treated in our hospital. There were 18 men and 2 women, with a mean age of 61 years at the time of recurrence. Six patients had a normal liver. Fourteen patients had associated liver cirrhosis. using Pugh's classification, 7 patients were Pugh A, 6 Pugh B and 1 Pugh C. The initial hepatic resection had consisted of major hepatectomy in 9 cases and segmentectomy in the remaining 11 patients. The mean time to recurrence was 17 months. There were 3 recurrences on the resection margin and 17 recurrences away from the hepatic stump. The therapeutic choice after hepatic recurrence was based on the number of tumors, hepatic function and the size of the liver remnant. Six patients were treated by tamoxifen due to poor hepatic function; median survival after recurrence was 6 months. Four patients with a single recurrent tumor on an atrophied liver remnant were treated by percutaneous ethanol injection with a median survival after recurrence of 15 months. Five patients with multiple diffuse lesions and good hepatic function were treated by transarterial chemoembolisation with a median survival after recurrence of 30 months. Five patients with a solitary tumor and good hepatic function underwent a second hepatic resection with a median survival after recurrence of 35 months. The overall median survival after diagnosis of recurrence was 20 months.
These results suggest that an active treatment should be carried out in cases of recurrence of HCC. A second resection, if technically possible, offers the best chance of survival.

PMID: 9752504 [PubMed - indexed for MEDLINE]

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Conclusions :

Ces résultats suggèrent qu'un traitement actif doit être effectuée en cas de récidive du CHC. Une deuxième résection, si cela est techniquement possible, offre la meilleure chance de survie.