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Cancer de l'oesophage

Publié dans Cancérologie digestive et gynécologique

Cette rubrique a pour but de vous informer pour mieux comprendre ce qu'est cette maladie. Comme chaque cas est unique, seul le dialogue avec votre médecin vous permettra de bien comprendre votre situation.


I. Introduction

Environ 5.000 personnes sont touchées chaque année en France par un cancer de l'œsophage. Dans 80 % des cas, ce sont des hommes, âgés de plus de 55 ans. La majorité des cancers de l'œsophage sont des cancers épidermoïdes, développés à partir de l'épithélium. Les adénocarcinomes sont plus fréquents à la partie basse de l'œsophage. 90 % des cancers de l'œsophage sont dus à la consommation de tabac et/ou d'alcool, l'action de deux se renforçant mutuellement. Toute dysphagie (gêne à la déglutition) d'apparition récente et rapidement évolutive doit faire consulter sans tarder. Le diagnostic repose sur l'endoscopie qui permet de faire des biopsies afin de préciser le type histologique du cancer. Le traitement est avant tout chirurgical : oesophagectomie. Lorsque l'intervention est contre-indiquée, d'autres méthodes peuvent être employées (destruction de la tumeur par utilisation du laser ou du plasma argon, mise en place d'une prothèse œsophagienne, dilatations de l'œsophage par endoscopie). La radiothérapie, la chimiothérapie ou leur association ont des indications qui se discutent au cas par cas.

Le pronostic du cancer de l'œsophage est essentiellement lié à l'extension de la tumeur, à l'existence d'un envahissement ganglionnaire et à la présence de métastases.
Mieux connaitre
L'œsophage est un tuyau souple, situé entre le pharynx et l'estomac. L'œsophage est situé entre le pharynx et l'estomac ; il permet d'acheminer les aliments. Il parcourt le thorax de haut en bas, en arrière de la trachée. Puis, il traverse le diaphragme et aboutit dans l'estomac avec lequel il communique par l'intermédiaire du cardia. L'œsophage sert à acheminer les aliments. Il est pourvu de muscles lisses qui se contractent de façon réflexe dès qu'un aliment ou un liquide lui parvient.


II. Types de cancers

Le cancer de l'œsophage peut se présenter sous différentes formes:
Selon le type histologique

  • La majorité des cancers de l'œsophage sont des cancers épidermoïdes, développés à partir de l'épithélium.
  • L'adénocarcinome est plus rare (20 à 30 % des cas) et siège plutôt à la partie basse.
  • Les autres types de cancers sont exceptionnels : indifférenciés à petites cellules, sarcomes, lymphome…

Selon le siège Le cancer peut être situé au niveau de l'œsophage cervical, thoracique ou abdominal.


III. Facteurs de risque

Des facteurs de risque du cancer de l'œsophage ont été mis en évidence : 90 % des cas de cancer de l'œsophage sont imputables à la consommation de tabac et d'alcool, l'action de deux se renforçant mutuellement. Plus les consommations sont importantes et prolongées, plus le risque de cancer augmente. L'absorption de boissons encore brûlantes, comme le thé, en quantités importantes et régulières, peut entraîner des micro-traumatismes de l'œsophage susceptibles de favoriser également la survenue de ce cancer. Le rôle des radiations ionisantes est suggéré : après une radiothérapie thoracique, il existe un faible risque de cancérisation à long terme de l'œsophage.
Certaines lésions chroniques de l'œsophage prédisposent au cancer de l'œsophage :

  • des lésions cicatricielles après brûlure caustique, surtout en cas de sténose
  • l'endo-brachy-œsophage (anomalie du cardia, point de jonction entre l'œsophage et l'estomac), une lésion secondaire à un reflux gastro-oesophagien chronique, a un risque de dégénérescence en adénocarcinome
  • le méga-œsophage (ou achalasie) : il s'agit d'un dysfonctionnement de l'œsophage qui entraîne des difficultés de déglutition à l'origine d'une stagnation des aliments dans l'œsophage, qui se dilate exagérément
  • le syndrome de Plummer-Vinson, très rare, se caractérisant par une anémie accompagnée d'un taux de fer bas dans le sang. Il associe une atteinte des phanères (peau, ongles, cheveux) et des muqueuses, de l'œsophage en particulier


IV. Prévention

D'abord et avant tout :

  • en supprimant le tabac : une aide est souvent nécessaire. Votre médecin traitant ou une consultation antitabac peut assurer votre prise en charge. En fonction de votre dépendance à la nicotine et de vos souhaits, diverses méthodes (patchs, gommes, etc.) vous seront proposées.
  • en diminuant la consommation d'alcool : une aide médicale peut aussi être bénéfique dans ce cas. La suppression totale du tabagisme et une consommation modérée de boissons alcoolisées (moins d'1/2 litre de vin par jour) permettraient d'éviter environ 90 % des cancers de l'œsophage.

mais aussi en consultant rapidement, en cas de signe suspect, notamment de difficultés de déglutition.
En effet, des lésions bénignes peuvent dégénérer. Leur traitement évitera un cancer.


V. Symptômes

Le cancer de l'œsophage ne donne pas de signes cliniques au début. Il peut alors être découvert de façon fortuite, dans le cadre d'un bilan pour un cancer ORL par exemple ou chez une personne présentant une cirrhose du foie.Tout signe d'appel oesophagien peut révéler un cancer. Le signe le plus important est la dysphagie : il s'agit d'une sensation de gêne lors de la déglutition qui traduit l'existence d'un obstacle oesophagien. Cette dysphagie doit alerter lorsqu'elle est récente et évolue rapidement. Les autres signes apparaissent généralement plus tardivement : douleurs thoraciques, derrière le sternum épigastralgies (douleurs situées au-dessus du nombril) altération de l'état général (fatigue, amaigrissement) hématémèse (vomissements de sang) dysphonie (changement de tonalité des sons émis), due à une paralysie du nerf laryngé par envahissement tumoral Diagnostic.

Quelles que soient les circonstances de découverte, le diagnostic repose sur l'endoscopie qui permet de faire des biopsies afin de préciser le type histologique du cancer. Le transit baryté oesophagien permet de déterminer le siège et l'étendue de la lésion. D'autres examens sont réalisés pour faire un bilan de l'extension du cancer et de l'état de santé du malade. Ils ne sont pas tous effectués de façon systématique mais en fonction des caractéristiques propres à chaque malade. l'endoscopie trachéobronchique permet de rechercher un envahissement ou un cancer associé. le scanner thoracique évalue l'extension éventuelle aux organes de voisinage et les métastases pulmonaires. l'échoendoscopie, en visualisant les couches de la paroi de l'œsophage, permet un bilan plus précis de l'extension que le scanner.
Au terme de ce bilan, le cancer peut être classé en différents stades selon la classification T.N.M., système international de classification des tumeurs malignes. La lettre "T", pour tumeur, précise son extension locale ; la lettre "N", pour node (adénopathie ou ganglion lymphatique augmenté de volume) fait le point sur l'état des adénopathies régionales ; la lettre "M" désigne les métastases. Cette classification permet de déterminer le traitement qui sera le mieux adapté au malade. Le bilan général permet d'apprécier l'opérabilité du malade et repose sur trois facteurs importants :
la fonction respiratoire
le retentissement nutritionnel, jugé sur la perte de poids
la fonction hépatique
Le pronostic du cancer de l'œsophage est lié à l'extension de la tumeur, à l'existence d'un envahissement ganglionnaire et à la présence de métastases. L'état des fonctions respiratoires, cardiaques et hépatiques est également important à prendre en compte.


VI. Traitements

Le traitement du cancer de l'œsophage repose avant tout sur la chirurgie. L'intervention est une oesophagectomie, consistant à retirer la tumeur et les portions de l'œsophage adjacentes. Le rétablissement de la longueur du tube digestif est obtenu en faisant remonter l'estomac dans le thorax ou parfois le colon (figures 1,2,3 et 4). Quand il existe une contre-indication à l'intervention chirurgicale, le traitement comporte une destruction de la tumeur par utilisation du laser ou du plasma argon, ou la mise en place d'une prothèse œsophagienne(figure 5), ou encore des dilatations de l'œsophage par endoscopie.

La radiothérapie, la chimiothérapie ou leur association ont des indications qui se discutent au cas par cas. La chimiothérapie a beaucoup progressé. Elle est parfois proposée avant l'intervention

    

    

 

I. Complications post-opératoires

- Le risque majeur de l’intervention de LEWIS SANTY est la fistule anastomotique, autrement dit la fuite de salive passant dans l’œsophage, ou d’aliments à travers la suture entre l’œsophage et l’estomac (suture non étanche). Cette fistule peut entraîner une médiastinite (infection de la partie centrale du thorax). Une fistule peut imposer en urgence la mise en place d’un stent (ressorts) par les voies naturelles, afin d’obstruer le trou de la couture, et /ou une ré intervention en urgence. La mise en place de stent s’effectue sous anesthésie générale, par nos confrères gastro entérologues .

Dans quelques cas, en cas d’échec de la mise en place du stent, une ré intervention est nécessaire. Ce risque de fistule anastomotique représente 3 à 7 % des chirurgies œsophagiennes et persiste les 8 premiers jours postopératoires. 

- Le 2ème risque majeur est la nécrose du transplant gastrique : la partie inférieure de l’estomac raboutée à l’œsophage, est alimentée par le sang uniquement par une artère et une veine. Dans certaines circonstances, cette artère ou cette veine peut se boucher ce qui a pour conséquence une souffrance et donc une nécrose de l’estomac restant. Une intervention en urgence est donc nécessaire : l’ablation de l’estomac restant.

- La chirurgie de LEWIS SANTY est une chirurgie potentiellement contaminante, en raison des bactéries contenues dans l’œsophage et la partie inférieure de l’estomac. Cette chirurgie expose donc à un risque :

  • d’abcès de paroi (abcès de cicatrice, tant au niveau du thorax que de l’abdomen).
  • d’abcès intra abdominal (abcès à l’intérieur de l’abdomen) pouvant nécessiter des antibiotiques voire un drainage (évacuation au travers de la peau).
  • d’abcès intra thoracique pouvant nécessiter un drainage (évacuation de l’abcès).

- Les autres complications de la chirurgie œsophagiennes sont inhérentes à tout acte de chirurgie lourde (hémorragie, infection, phlébite ou embolie).

- La complication infectieuse la plus fréquente est l’infection pulmonaire, en raison de la proximité entre l’œsophage-estomac et le poumon. Ces infections pulmonaires, ou pneumonies, sont généralement traitées par antibiothérapie, oxygénothérapie et kinésithérapie respiratoires.

- Des vomissements spontanés, même en présence d’une sonde gastrique qui a pour but de vider le contenu gastrique, peuvent entrainer une grave souffrance pulmonaire appelé SDRA. Le mécanisme de lésion des poumons par régurgitation de liquide gastrique est connu sous le nom de syndrome de MEDELSON. 


B- Certaines complications peuvent subvenir pendant l’intervention :

  • Une réaction à l’anesthésie,
  • Un saignement,
  • Une blessure d’organe abdominal, comme la rate, organe situé au contact de l’estomac et nécessitant quelquefois une splénectomie d’hémostase (ablation de la rate pour saignements).
  • L’estomac restant n’étant alimenté que par une seule artère et une veine, il peut arriver dans de très rare cas que cette vascularisation ne soit pas suffisante pour une bonne vitalité du transplant. Dans ce cas le rétablissement immédiat entre l’œsophage et l’estomac ne sera pas
    possible et il sera nécessaire de remplacer l’estomac par le colon secondairement.
  • Certains risques peuvent être inhérents à l’anesthésie générale (comme une embolie pulmonaire, une attaque cérébrale, un infarctus, ou une paralysie d’un membre par compression nerveuse).


C- En résumé :

  • Lorsqu’une complication est constatée durant l’intervention, elle peut être traitée dans la plupart des cas pendant l’intervention. En ce qui concerne les complications postopératoires, des précautions seront prises, pour parer à tout(s) problème(s) éventuel(s) postopératoire(s) pouvant être évité(s).
  • Pour cela, un bilan pré opératoire, consultation anesthésie et pré anesthésie, complété systématiquement d’une consultation cardiologique et pneumologique.
  • Lors de l’hospitalisation, un des chirurgiens de l’équipe est joignable 24 / 24 H, weekend et jours fériés compris.
  • Des visites quotidiennes chirurgicales sont systématiques.
  • Un médecin urgentiste, un anesthésiste, un réanimateur et un cardiologue sont présents sur place nuit et jour à la Clinique St Pierre.
  • En post-opératoire immédiat, vous serez hospitalisé(s) directement dans le service de réanimation chirurgicale, où vous serez constamment surveillé(s) par une équipe para médicale spécialisée et le réanimateur.
  • Il sera envisagé un transfert en service de surveillance continue, puis secondairement dans une chambre classique.


II. Effets indésirables

L'intervention chirurgicale va généralement nécessiter une rééducation respiratoire pour permettre au patient de retrouver une capacité respiratoire suffisante.
Les médicaments de la chimiothérapie ont en commun d'entraîner certains effets secondaires, plus ou moins accentués selon les produits. Ils régressent avec l'arrêt des produits, mais peuvent être prévenus ou corrigés lors de leur apparition:

  • les nausées et vomissements : redoutés par les malades, ils sont heureusement aujourd'hui moins intenses grâce aux médicaments utilisés et à l'action préventive d'antiémétiques puissants (médicaments qui empêchent les vomissements).
  • la diarrhée : il faut boire abondamment eau, thé, bouillon ou des boissons gazeuses pour éviter tout risque de déshydratation. En cas de persistance, des médicaments antidiarrhéiques peuvent être prescrits.
  • la constipation : assez fréquente, elle est liée à la chimiothérapie, aux médicaments antiémétiques ou encore à l'inactivité physique. Elle sera soulagée par un traitement spécifique.
  • les aphtes : relativement rares, ils varient selon les protocoles de chimiothérapie utilisés. On parle aussi de "mucite buccale". Ils seront prévenus par des bains de bouche après les repas. Lorsqu'ils sont nombreux, ils peuvent être la conséquence d'une diminution du nombre de globules blancs, dont le taux doit alors être contrôlé par une prise de sang.
  • la chute de cheveux ou alopécie : elle est fréquente mais pas systématique. Elle est le plus souvent progressive, démarrant 2 à 3 semaines après la première perfusion. Elle est temporaire, les cheveux repoussant toujours à la fin de la chimiothérapie. Selon les médicaments utilisés, on peut proposer le port d'un casque réfrigérant pendant la séance de chimiothérapie, mais il faut savoir que son efficacité est variable.
  • la diminution de certains globules blancs : le nombre des polynucléaires neutrophiles diminue souvent (neutropénie). Généralement de courte durée, cette diminution est sans conséquence. Cependant, une surveillance par prises de sang régulières est effectuée. En cas de chute trop importante (aplasie), la malade court alors un risque d'infection.
  • la diminution des globules rouges : appelée aussi anémie, elle peut survenir en fin de traitement. Elle peut être responsable d'une fatigue importante. la diminution des plaquettes ou thrombopénie : elle entraîne un risque d'hémorragie en cas de coupure accidentelle, car les plaquettes permettent la coagulation du sang.
  • la fatigue : c'est un effet secondaire fréquent de la chimiothérapie. La fatigue est en réalité liée à plusieurs facteurs : la maladie elle-même, les traitements associés entre eux, la baisse des globules rouges lors de la chimiothérapie, mais aussi le stress et l'angoisse.
  • une irrégularité des règles, voire même leur arrêt : c'est une complication assez fréquente de la chimiothérapie, chez la femme non ménopausée. Cet arrêt est transitoire et les règles réapparaissent généralement dans les mois qui suivent l'arrêt du traitement. La détresse psychologique qui peut accompagner votre maladie est aujourd'hui mieux comprise et considérée. Pour mieux vivre avec sa maladie, il est essentiel d'avoir des explications et des informations pour comprendre. L'équipe soignante, les médecins psychiatres ou les psychologues sont à même d'apporter au malade une aide morale précieuse. Il est important d'établir une bonne relation avec le médecin, le conjoint et les proches pour conserver un équilibre psychologique. Les associations de patients sont également très utiles car elles permettent de rencontrer des personnes ayant vécu les mêmes expériences et qui peuvent donc donner des conseils avisés.



III. Suivi

Plus le cancer est détecté précocement, plus les chances de guérir sont importantes. Cependant, chaque cas est particulier et les chances de guérison doivent être estimées à partir de l'ensemble des résultats.  La surveillance clinique doit être prolongée et régulière pour dépister une éventuelle récidive de la maladie. Le malade est revu tous les 3 mois pendant 2 ans, puis tous les 6 mois. Même si vous avez eu un cancer, l'arrêt de la consommation d'alcool et de tabac est bénéfique et permet de diminuer le risque de récidive. Si vous avez, après le traitement, des difficultés à vous alimenter, il est important que vous assuriez un apport calorique suffisant : demandez à votre médecin, si besoin, qu'il vous oriente vers un nutritionniste afin qu'il vous conseille. En période aiguë, il peut arriver que l'on vous propose, pendant quelque temps, des compléments nutritionnels et vitaminiques, voire une alimentation par sonde ou par perfusions. La reprise d'une activité physique est possible, mais doit se faire très progressivement.

La réinsertion socio-professionnelle après la maladie a pour but d'aider le patient et sa famille dans sa vie quotidienne. L'aide d'une assistante sociale pendant la maladie peut permettre au malade d'éviter ou de résoudre certaines difficultés pendant les hospitalisations, mais aussi après les traitements. Un tel suivi facilite la reprise d'une vie normale. A noter que les associations d'anciens patients et de bénévoles peuvent également aider le malade par leur expérience et lui apporter des conseils adaptés et des adresses utiles. En ce qui concerne la reprise du travail, l'idéal, si l'organisation professionnelle le permet, est de reprendre progressivement le travail, à temps partiel par exemple. La loi prévoit d'ailleurs des aménagements du temps du travail. Là encore, il est conseillé de s'adresser à une assistante sociale, car les dispositions dépendent de nombreux facteurs (situation particulière, employeur, Caisse de Sécurité sociale).