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Le cancer du pancreas

Publié dans Cancérologie digestive et gynécologique

I. Qu’est-ce qu’un cancer du pancréas ?

Le pancréas est une glande située profondément dans l’abdomen derrière l’estomac. Il joue un rôle dans la digestion (production du suc pancréatique) et dans la production d’hormones, comme l’insuline.

Un cancer du pancréas, ou adénocarcinome canalaire, est une maladie des cellules constituant les canaux qui transportent le suc pancréatique. Il se développe à partir d’une cellule initialement normale qui se transforme et se multiplie de façon anarchique pour former une masse, appelée tumeur maligne.

Des cellules cancéreuses peuvent s’en détacher et migrer vers d’autres tissus ou organes où elles forment de nouvelles tumeurs appelées métastases.. Beaucoup surviennent sans explication connue. On estime à plus de 10 000 le nombre de nouveaux cas en France en 2010. Ce cancer est un peu plus fréquent chez l’homme que chez la femme. Il survient le plus souvent entre 70 et 80 ans.

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C’est un cancer qui survient le plus souvent après 50 ans. Sa survenue est favorisée par le tabac, des lésions préexistantes du pancréas (pancréatite chronique, lésions pré cancéreuses), une consommation élevée d’alcool, la présence d’une obésité, d’un diabète et rarement par une susceptibilité génétique familiale.
Ses symptômes varient suivant la localisation de la tumeur au sein du pancréas.
Une tumeur de la tête du pancréas provoque rapidement une compression de la voie biliaire principale qui est responsable d’un jaunisse (ictère) par reflux des constituants de la bile dans le sang et les urines (qui sont alors foncées) alors que la bile ne parvient plus dans le tube digestif expliquant la décoloration des selles associée.


Une tumeur du corps ou de la queue du pancréas n’entraine pas d’ictère et se révèle souvent plus tardivement par des douleurs ou une altération de l’état général.

 

II. Comment est fait le diagnostic ?

Les symptômes du cancer du pancréas sont toujours atypiques et se manifestent les plus fréquemment par :

  • une perte de poids et d’appétit,
  • une douleur dorsale aiguë,
  • une urine foncée,
  • des selles décolorées,
  • des phlébites superficielles ou thromboses,
  • un état dépressif,
  • la jaunisse ou ictère lorsqu’il y a compression des voies biliaires.

Le bilan s’appuie principalement sur un examen clinique, une échographie abdominale et un scanner thoraco-abdomino-pelvien. Il est complété dans certains cas par une échoendoscopie (échographie couplée à une endoscopie réalisée sous anesthésie générale) ou une IRM du foie. Il n’existe pas de marqueur tumoral (dosage sanguin) permettant de contribuer au diagnostic . Selon les besoins, d’autres examens peuvent être prescrits. Le diagnostic de l’adénocarcinome céphalique repose sur un faisceau d’arguments cliniques, morphologiques et biologiques ; lorsque ces arguments convergent, la preuve histologique avant la résection pancréatique n’est pas exigée [1-4] et la preuve du cancer souvent apportée par l’examen au microscope par le médecin anatomopathologiste de la portion de pancréas retirée par le chirurgien. La biopsie (prélèvement d’un petit fragment de la tumeur pour affirmer par examen au microscope le diagnostic de cancer du pancréas) par voie échoendoscopique est utile en cas de doute diagnostique car elle peut permettre d’éviter une laparotomie et a fortiori une résection, inutiles comme par exemple dans les pancréatites « auto-immunes » ou chroniques [4]. La biopsie est en revanche indispensable si une chimiothérapie ou une radiothérapie est décidée chez un patient dont la tumeur n’est pas opérable.

En pratique, les contre-indications formelles à un geste d’exérèse à visée curative admises par tous sont :

  • la présence d’une carcinose péritonéale ou de métastases hépatiques ;
  • l’envahissement d’une ou plusieurs adénopathies lombo-aortiques ;
  • un envahissement du tronc coeliaque, de l’artère hépatique ou de l’artère mésentérique supérieure ;
  • une thrombose de l’axe veineux mésentérico-portal associée à un cavernome portal. En revanche, lorsque l’axe veineux est perméable, l’envahissement veineux n’est qu’une contre-indication relative à une exérèse « d’emblée », sous réserve de critères précis permettant d’espérer une résection curative de type R0 [1-4].


III. À quoi servent ces examens ?

Ces examens permettent de vous proposer un traitement adapté à votre situation, selon l’extension de la maladie cancéreuse (son stade), la possibilité ou non d’enlever la tumeur par une intervention chirurgicale, votre état de santé général et les éventuelles contre-indications aux traitements.


IV. Comment est fait le choix de vos traitements ?

Des médecins de spécialités différentes se réunissent lors d’une réunion appelée réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP). Compte tenu de votre situation et en s’appuyant sur des référentiels de bonne pratique, ils élaborent une proposition de traitement. Celle-ci vous est ensuite expliquée, au cours d’une consultation du dispositif d’annonce, par le médecin qui vous prend en charge pour le cancer. Elle tient compte de votre avis et doit faire l’objet de votre accord. Un programme personnalisé de soins (PPS) vous est alors remis et est envoyé à votre médecin traitant. Il peut également vous être proposé de participer à un essai clinique.


V. Quels sont les professionnels de la santé qui vous prennent en charge ?

Vous êtes pris en charge par une équipe spécialisée dans un établissement autorisé à traiter les cancers digestifs . Cette équipe rassemble toutes les compétences nécessaires. Elle travaille en lien régulier avec votre médecin traitant. Selon votre situation, différents professionnels peuvent être impliqués : hépato-gastro-entérologue, chirurgien, oncologue médical et radiothérapeute, pathologiste, médecin spécialiste de la douleur, radiologue, anesthésiste, infirmiers, diététicien, psychologue, assistante sociale, etc.

 

VI. Les traitements du cancer du pancréas

VI a. À quoi servent les traitements proposés ?

Selon les cas, les traitements proposés ont pour buts :
de guérir du cancer en cherchant à détruire la tumeur et les autres cellules cancéreuses éventuellement présentes dans le corps ;
de contenir l’évolution de la maladie si elle ne peut pas être éliminée ;
de traiter les symptômes afin de vous assurer la meilleure qualité de vie possible.

 

VI b. Quels sont les traitements disponibles ?

Dans 10 à 20 % des cas, il est possible d’enlever la tumeur par une intervention chirurgicale avec pour objectif de guérir de la maladie. Il s’agit d’une opération complexe, le plus souvent complétée d’une chimiothérapie 4 à 8 semaines plus tard.

La résection chirurgicale de la partie tumorale du pancréas constitue la base du traitement à visée curative des cancers du pancréas. Elle n’est envisageable que si la tumeur reste localisée au pancréas sans avoir essaimé des cellules tumorales dans d’autres organes, responsables de la formation de tumeurs filles appelées métastases.

Les sites les plus fréquents des métastases d’origine pancréatiques sont le foie et les poumons. Leur recherche fait partie du bilan pré-opératoire des cancers du pancréas réalisé par le scanner thoracique et abdomino pelvien auquel peut être ajouté si nécessaire un PET-scan (injection d’un sucre marqué par un traceur radio-actif qui va se fixer sur les cellules tumorales en division).

L’envahissement local péri pancréatique d’organes ou de vaisseaux voisins peut soit s’avérer résécable avec la tumeur par une intervention chirurgicale plus complexe avec reconstructions vasculaires veineuses (envahissement de la veine mésentérique supérieure, de la veine porte ou de la veine splénique) soit constituer une contre indication à l’exérèse chirurgicale qui n’est parfois identifiée qu’en cours d’intervention conduisant le chirurgien à renoncer à la pancréatectomie au profit d’autres gestes chirurgicaux destinés à traiter les symptômes : dérivation biliaire pour traiter l’ictère en restaurant un circuit pour la bile, dérivation gastrique pour éviter une occlusion digestive par la tumeur.

La chimiothérapie utilise des médicaments anticancéreux qui agissent dans l’ensemble du corps sur toutes les cellules cancéreuses, y compris celles qui ne sont pas repérables par les examens. Elle peut nécessiter la pose d’une chambre implantable. La  GEMCITABINE est aujourd’hui systématiquement proposée après la résection à visée curative d’un cancer du pancréas. Elle a montré son efficacité pour réduire le risque de récidive. La durée de ce traitement est de 6 mois. Ce produit est également proposé en cas de tumeur non résécable.
D’autres chimiothérapies peuvent être alors également utilisées.

Si la tumeur n’est pas opérable, une chimiothérapie, associée dans certains cas à une radiothérapie, peut contribuer à ralentir le développement de la maladie, à soulager les symptômes (diminuer les douleurs notamment) et à améliorer la qualité de vie.
La tumeur peut créer un obstacle à l’écoulement de la bile vers l’intestin provoquant démangeaisons et jaunisse. Dans ce cas, il est nécessaire de drainer la bile en posant une endoprothèse par voie endoscopique ou en réalisant une dérivation par opération chirurgicale.
L’intervention comprend l’ablation d’une partie de l’estomac, de la vésicule biliaire, d’une partie des voies biliaires, de la tête du pancréas et de la totalité du duodénum.

 

Tous les traitements proposés peuvent avoir des effets indésirables, comme, par exemple, des troubles digestifs. Ils surviennent à plus ou moins brève échéance après les traitements et vous sont expliqués par le médecin qui vous suit et qui s’assure de leur prise en charge.


VIc. Les soins de support

Pour faire face aux conséquences de la maladie et de ses traitements : douleur, troubles alimentaires, fatigue, besoin de soutien psychologique, problèmes sociaux, etc., des soins et soutiens complémentaires peuvent être nécessaires. Ces soins, appelés soins de support, sont assurés par différents professionnels (médecin spécialiste de la douleur, diététicien, psychologue, assistante sociale, etc.) qui exercent, selon les cas, au sein d’un établissement de santé, en hospitalisation à domicile, en consultation de ville, dans le cadre d’un réseau de santé, d’une association de patients, etc.


VII. Le suivi du cancer du pancréas après les traitements

VII a. Pourquoi un suivi ?

Un suivi vous est proposé pour :

  • vous accompagner dans l’évolution de votre maladie ;
  • détecter et traiter d’éventuels effets indésirables des traitements ;
  • s’assurer que votre qualité de vie soit la meilleure possible.


VII b. En quoi consiste le suivi ?

Le suivi dépend du stade auquel a été diagnostiqué votre cancer et du traitement que vous avez reçu. Le calendrier et la durée sont déterminés avec votre médecin en collaboration avec l’équipe spécialisée ayant réalisé le traitement. La surveillance au long cours après pancréatectomie pour cancer du pancréas est basée sur des contrôles réguliers associant le plus souvent à l’examen clinique un dosage sanguin de l’ACE et du CA 19-9 et un examen radiologique de l’abdomen (échographie, scanner, IRM) et des poumons. Un suivi nutritionnel est mis en place au plus tôt.
Votre médecin vous indique également les signes qui doivent vous amener à consulter en urgence : démangeaisons et jaunisse notamment.

La survenue d’une récidive du cancer, locale intra abdominale ou métastatique à distance est possible même au-delà de 10 ans après la chirurgie initiale ne justifie que très rarement une réintervention chirurgicale. Son traitement est basé sur la chimiothérapie éventuellement associée à la radiothérapie.

Les différents médecins participant à la surveillance se tiennent mutuellement informés. Dans certains cas, il peut vous être proposé de recourir à des équipes spécialisées en soins palliatifs.


Références:

1. Cancer du pancréas (Thésaurus National de Cancérologie Digestive)http://www.snfge.asso.fr/01-Bibliotheque/0D-Pratiques-cliniques/referentiels.asp     

2. Recommandations de pratiques chirurgicales 2009 - (SFCD / ACHBT labellisées INCa-HAS) Pancréas : A Sauvanet, JR Delpero.  http://www. snfge.asso.fr/01-Bibliotheque/0D-Pratiques- cliniques/Reco_hors_HAS/ recos_chir_sfcd_long.pdf

3. Slim K. Cancérologie digestive : pratiques chirurgicales. J Chir 2009;146 (Suppl. 2):S11-S80.

4. Delpero JR. Quand ne pas biopsier une masse solide du pancréas ? Association nationale française de formation continue en hépato-gastroentérologie. In : Post’U. Springer Éd., 104-12 http://www.snfge.asso.fr/01-Bibliotheque/0B-ConferencesFlash/2009/267/indexConf.asp